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Comme le rappelle Patrick
Brion dans son livre Tex Avery (Ed. du Chêne), la M.G.M.
est alors au faîte de sa gloire et, certainement, la première des
compagnies cinématographiques hollywoodiennes. Après quelques
débuts peu satisfaisants (relatif échec de la série Happy
Harmonies), son département animation a touché le jack-pot
avec la série Tom et Jerry, créée en 1940 par Hanna et
Barbera.
C'est le producteur Fred Quimby qui est chargé de la supervision
du département animation. Comme le rapportait Tex Avery : "Il
ne connaissait rien aux scénarios ou aux gags, ou à quoi que ce
soit, et il en convenait". Mais, contrairement à Schlesinger,
Quimby va laisser une énorme liberté à ses équipes, ce qui va
permettre à la M.G.M. de produire le meilleur de cet âge d'or du
cartoon et au génie de Tex Avery d'exploser.
Dans ce contexte de liberté et de crédits confortables, Avery va
bénéficier d'un apport indispensable : une équipe extrêmement
stable composée de réels talents dans leur domaine respectif.
Scott Bradley signera toutes les musiques d'Avery à la M.G.M.,
Rich Hogan et Heck Allen écriront la totalité des sujets. Mais
c'est vers l'animation qu'il faut, bien entendu, tourner les
yeux. Des animateurs chevronnés, formés dans les meilleurs
studios de l'époque, vont constituer le noyau dur de l'équipe
jusqu'en 1947-48 : Preston Blair, Ray Abrams, Ed Love, auxquels
viendra s'ajouter Walter Clinton en 1945.
Ce dernier point est très important, car le ressort le plus
important de l'oeuvre d'Avery reste l'accélération du rythme des
cartoons, la multiplication des événements et des gags dans le
temps. Cette intention était déjà visible dans The Early Bird
Dood It (premier film mis en production), elle est étonnante
dans les magnifiques Dumb-Hounded et What's Buzzin'
Buzzard et deviendra paroxystique dans les épisodes du
Squirrel.
Cette élévation du rythme est rendue possible par la qualité et
la fluidité extraordinaire de l'animation. La référence
qualitative de l'époque restait Disney, irréprochable
techniquement. Sur ce terrain aussi, le studio M.G.M. souhaitait
relever le gant. Les productions, pas seulement celles d'Avery
d'ailleurs (car il existe une véritable émulation avec l'équipe
Hanna-Barbera, voire une synergie, par le passage d'animateurs
d'une équipe à l'autre) dépassent souvent leur modèle.
Quand les difficultés financières commenceront
à réduire le train de vie des studios, obligeant au départ des
meilleurs, l'animation deviendra beaucoup plus frustre, poussant
à la stéréotypie des situations. Mais, jusqu'à la fin des années
1940, le génie de Tex Avery va pouvoir s'appuyer sur les qualités
essentielles de son équipe, lui permettant la mise en oeuvre de
son véritable projet : faire rire, tout en dynamitant les
conventions, celles du cartoon américain comme celles de
l'american way of life.
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